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L’Europe unifiée sur les pages de « Kultura »


IWONA HOFMAN


L’idée de l’Europe unifiée, dont on débattait sur les pages de « Kultura » quasiment dès ses premiers numéros, n’était pas la seule conception « utopiste » dirigée contre les projets du gouvernement polonais de Londres, après 1945. Dans cette atmosphère de l’imminence d’une nouvelle guerre qui aurait rétabli l’ordre en Europe de l’Est, dans l’attente du retour de Vilnius et de Lviv à la mère patrie, le rêve de l’Europe unie semblait irréalisable. 

La problématique de l’unification du continent revient à maintes reprises, et la terminologie employée, tels que « rassembler l’Europe », « intégration » et autres, reflète le processus de la formulation du projet, des questionnements multiples et son évolution suivant des débats intellectuels et politologiques. 

Les pages de « Kultura » ont accueilli un riche ensemble d’articles de fond où les auteurs retrouvent la genèse de l’intégration européenne dans la théorie de la crise civilisationnelle, culturelle de l’Occident, après 1945. Les articles portant sur les faits et les événements historique qui accompagnaient le processus de l’intégration forme un groupe à part. Les aspects pragmatiques et régionaux de ce processus sont analysés des points de vue sociologique, économique et politologique. Il est aussi intéressant de se pencher sur les conceptions fédéralistes, de neutralisation, du projet du gouvernement mondial, de la place de l’Allemagne divisée en Europe (dans son article « Réflexions pour le Nouvel An », Juliusz Mieroszewski emploie une expression fort adéquate et actuelle à l’époque : « l’Allemagne partagée en deux dans une Europe partagée – l’Allemagne unifiée dans une Europe unie », « Kultura », 1962, n° 1 – 2). Les articles consacrés aux aspirations européennes de la Pologne ont trouvé un riche contexte dans le rôle de notre pays à l’Est (définie comme « ZWORNIK » SPRZEGLO) et dans le postulat du bon voisinage avec l’Ukraine, la Lituanie et la Biélorussie indépendantes, après l’éclatement inévitable de l’URSS (il s’agit de la conception ULB définie par la plume de J. Mieroszewski, en étroite collaboration et sous l’inspiration de Jerzy Giedroyc ce dont témoigne la correspondance entre le rédacteur et le journaliste). 

L’engagement de « Kultura » dans cette dernière question a été ainsi qualifié par Gustaw Herling-Grudzinski : « il existait, dans l’évangile non écrit de « Kultura » un point de première actualité, à savoir la place de la Pologne dans le monde, avant tout au coeur de l’Europe. C’était la vision de Giedroyc, de Mieroszewski et de « Kultura » : la Pologne libre alliée à la Lituanie, la Biélorussie et l’Ukraine libres, amie de la Russie libre ». Bohdan Osadczuk, le scrupuleux chroniqueur des relations entre la Pologne et l’Ukraine, depuis 1990, il a écrit ceci à propos de la conception ULB : « le projet à la mesure de ces temps et ces opinions d’autrefois, qui frôlait une belle utopie, a sorti notre géopolitique de l’impasse et conduit sur la voie actuelle de réconciliation ». 

La problématique de l’Europe unifiée apparaissait souvent sur les pages de « Kultura » dans divers cycles et rubriques, comme « Archives politiques », « Voisinage », « Questions économiques », « Evénements du mois ». Parmi les auteurs se trouvaient les collaborateurs permanents, qui écrivaient les éditoriaux ou des analyses politologiques occasionnelles (J. Mieroszewski, Waclaw A. Zbyszewski, B. Osadczuk, Leopold Unger, Andrzej Koraszewski), tout comme les hommes politiques invités (Henry Kissinger, Zbigniew Brzezinski, Richard Pipes). Ici, les deux pôles des commentaires s’avéraient importants, comme par exemple dans l’analyse de la Communauté du charbon et l’acier, du Marché commun, de la possibilité de fédérer les pays baltes, de la conception de Mitteleuropa. Suivant le principe de l’ouverture, les auteurs se disputaient fréquemment à ce propos. Toutes sortes de genres étaient admis : analyse critique, lettre, communiqué, compte-rendu ou enquête (comme par exemple celle « Quelle Pologne au XXIe siècle ? ») Parallèlement au courant de chronique journalistique qui documentait la genèse de l’idée de l’union européenne et les moyens de la construire, on y attirait l’attention sur les différences culturelles entre l’Est et l’Ouest (plus spécialement dans les revues de presse, dans les chroniques et les lettres qui concernaient les aspirations des voisins). 

En raison du rôle particulier de J. Mieroszewski dans « Kultura » que l’on qualifiait souvent de porte-parole de J. Giedroyc et compte tenu de la portée prophétique de ses articles, il convient d’apporter une brève description de ses opinions. Mieroszewski « vivait dans une réflexion permanente sur la place de la Pologne indépendante et démocratique dans le monde », aussi ses projets orientaux restaient-ils en relation avec la politique occidentale de la Pologne face à l’Allemagne et à l’Europe, tout comme avec le rapport du monde libre et démocratique envers la Pologne. Il considérait que le renforcement de la position de la Pologne ne pouvait se produire que par la conquête de son influence à l’Est. Il recommandait la nécessité de l’alliance avec les pays ULB, avec « la Russie européanisée », comme un chemin menant à l’union européenne et comme une garantie de sécurité. Il construisait le projet de la Pologne dans le rôle de pont de l’Europe, prenant en compte ses positionnement et sa situation géopolitique. Il optait pour l’intégration européenne, en situant la question de l’unification allemande dans ce processus. Il essayait à maintes reprises de convaincre l’opinion publique du pays et de l’émigration de la nécessité d’accepter les frontières de l’après-guerre comme définitives. Dans ses articles, il prenait en compte les réalités politiques changeantes, y compris les doctrines évolutives des grandes puissances. 

Lorsque l’on analyse les articles que publiait « Kultura », il est possible de distinguer quatre principaux blocs thématiques liés à l’histoire et à l’actualité des projets d’unification. Ce sont : les déclarations de programme du tout début, découlant des diagnoses de la situation politique après 1945 ; puis les essais sur la naissance et la réalisation de l’idée de l’union ainsi que les interprétations de la conception de la fédération et de la neutralisation de l’Europe centrale et de l’Est, puis les relations des problèmes régionaux et globaux rencontrés lors de la réalisation des projets d’unification, les réflexions sur la Pologne dans l’Europe intégrée. 

Cet ensemble de questions est complété par des articles à valeurs éducatives qui contribuent à développer la curiosité, l’ouverture et l’acceptation de l’Autre. 

Les plus importantes questions auxquelles les auteurs du cercle de « Kultura » tentaient de répondre sont entre autres : que comprenons-nous du concept de l’intégration ? que ce processus signifie-t-il pour l’Europe ? quelles menaces pèsent-elles sur le processus de l’intégration ? quelles phobies et rancunes les Européens doivent-ils vaincre ? Les réponses à ces questions sont devenues de première actualité dans les années 1990 – 2000, lorsque le processus de l’unification de l’Europe s’enrichit du contexte de « l’administration » de la sphère élargie des pays souverains, indépendants de la pression russe. Au moment où l’on calculait les prix sociaux et politique de l’élargissement de l’Union européenne, ressurgit la crainte de la puissance économique et de la primauté de l’Allemagne unifiée. Les journalistes de « Kultura » soutenaient l’idée selon laquelle la seule garantie des intérêts de la Pologne démocratique est une entrée rapide dans la Communauté, l’acceptation de l’optique occidentale spécifique selon laquelle « plus notre position à l’Est est forte, plus on comptera avec nous en Occident » (le « Message » de Jerzy Giedroyc) ainsi que le soutien aux initiatives régionales. 

Cette opinion se basait sur une observation attentive de la politique durant le demi-siècle de l’existence de « Kultura ». Déjà en 1979, Leopold Unger écrivait : « la véritable alliance européenne, contrairement à ce que disent les démagogues de toutes sortes, ne supprime ni la souveraineté ni la démocratie mais les valorise (…) L’Europe devait montrer au monde l’idéal de l’union et de la collaboration. Dans l’impitoyable monde des défis globaux, seule peut compter l’Europe unifiée. Autrement, elle succombera à la finlandisation, au suicide nationaliste, ou pire encore. » (« Vu de Bruxelles. Et pourtant ça tourne… », « Kultura », 1975, n° 5). 

Après l’Automne des peuples, ces phrases sonnaient fort. Dans « Kultura », elles ont trouvé leur développement suivant : l’unification de l’Europe est possible à condition de respecter les particularités culturelles, et la véritable compréhension des craintes des pays souverains neufs, sortant à peine de la sphère d’influences russes. On soulignait que l’entrée de la Pologne dans l’Union intégrée lui procure une opportunité unique d’établir de bonnes relations avec l’Allemagne unifiée et des contacts d’amitié avec les voisins de l’Est et avec la Russie. 

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